mercredi 12 janvier 2011

La thématique abordée par Dina Bell (suite et fin)


(Doué d’une sensibilité à fleur de peau, Dina Bell ne pouvait s’illustrer que par une production de slow à grande échelle)

Dina Bell fait partie de la race des grands crooners du makossa. Il trône dans une place de choix avec ses amis et collègues du métier. Citons, Ngallè Jojo, Missè Ngo François, Ekambi Brillant, Ben Decca, Moni Bilé, Pierre De Moussy, Joe Mboulé, Jacky Ndoumbé, J.C. Mbimbé, Guy Lobé etc., Mais, passé le thème de l’amour, qui il est vrai, est prédominant dans sa production (celui-ci l’a permis de donner au public, la thématique de ses plus beaux slows), on s’aperçoit que Dina Bell est aussi un créateur qui maintient un lien assez fort avec le terroir.

Le rapport au terroir, le retour au pays natal

Dans quelques uns des ses albums, il développe ainsi une attitude nostalgique par rapport au pays, à Douala sa ville natale ; il nous y parle des liens qui le rattachent à sa famille, à ses amours, aux habitudes culturelles spécifiques à son environnement originel. Il exprime ces manques à travers l’évocation de l’absence de l’autre, et la poignante relation de ces saisons camerounaises (Epoupa ye ngea) devenues si lointaines et si différentes de celles qu’il vit en France. Et ce lien avec ce terroir se révèle finalement si puissant, qu’il induit pour lui, à priori, la nécessité d’un retour au pays. Dina Bell exprimera finalement, cet impératif, qui sera d’ailleurs suivi de l’acte de retour effectif au Cameroun, dans un album intitulé Mboa ni, sorti des bacs au milieu des années 80. Depuis lors, il vit certes entre les deux pays, mais la magie ou encore le leurre de l’expatriation qui pousse tant de jeunes gens loin de leur région natale, n’est plus qu’un souvenir sans véritable contenu pour lui !
Mboa ni : Je n’y suis plus, quoi qu’il arrive, je vais rentrer chez moi/ je n’ai aucune obligation d’être en France, je n’y ai pas plus de dette qui me contraindrait  à y demeurer/ j’ai simplement pris la décision de ne plus rester à l’étranger, même si je n’y aurai pas grand-chose, je resterai chez moi/ même si l’on décidait de m’y mettre aux petits soins, je ne resterais plus à l’étranger/ Il y a tant d’amour dans mon pays, tant de belles choses dans mon pays/ Demande-leur s’ils ne savent pas ce qu’il y a dans notre pays, notre Cameroun/ Il y a tant d’amour, tant de tendresse, tant de belles choses dans mon pays, dans notre Cameroun/



Bazor demeure toujours au centre de sa création

Quels que soient donc les thèmes abordés dans ses compositions, reconnaissons que Bazor, l’homme au béret et aux tenues africaines sur scène, nous entretient au premier-chef de ses préoccupations intrinsèques. Qu’il vente ou qu’il pleuve, il reste toujours campé au centre de sa création. Il n’y a jamais rien de téléphoner dans ses messages. Jamais, il ne lui vient à l’esprit de sacrifier aux exigences thématiques à la mode de l’heure, telles que les dénonciations et prises de position politiques dont sont devenus friands, certains chanteurs de makossa. Dans ses compositions, il continue à assumer son vécu personnel et celui de ses proches. Il fait écho ainsi toujours, sans rien forcer sur son talent, à la configuration traditionnelle du makossa, qui est d’être principalement, une musique festive, ludique, et même souvent mélancolique, principalement axée sur l’expression et des préoccupations individuelles que l’on qualifierait d’assez nombriliste.

Dina Bell et le slow camerounais

Tout comme Toto Guillaume, Ekambi  Brillant ou encore Ben Decca, Dina Bell est doué d’une sensibilité à fleur de peau. Celle-ci ne pouvait s’exprimer chez un artiste de sa trempe que dans la pratique du slow à grande échelle, si vous permettez l’expression ! Doué en plus de l’un des plus somptueux vocal de la planète makossa, et d’une technique de chant conséquente, l’homme ne pouvait produire, en ce genre où ne s’hasarde pas n’importe quel quidam, que des pièces d’exception !  Le créateur de Oa nde, Sophie, et de Se to mba, se catégorise parmi les tous premiers de la classe, dans un milieu spécieux, douillet, où les candidats, pour cause d’insuffisance technique et artistique, ne se bousculent pas au portillon.
Tout comme Ekambi Brillant, Toto Guillaume ou Ben Decca, Dina Bell a labellisé son slow aux yeux du public camerounais. Au point que Dina Bell sans sa production de slows ne serait pas Dina Bell !  Et s’il est un domaine par excellence, où sa présence viendrait à manquer aux mélomanes, c’est bien celui-là. Surtout que de nos jours, en ces années 2000- 2011, pour cause de carence de véritables spécialistes, le slow camerounais  est en perte de vitesse. Seuls quelques anciens, issus bien évidemment de l’âge d’or du makossa, continuent toujours à porter haut le flambeau du slow camerounais !
Mais enfin ! Y a-t-il un homme ou une femme ayant eu ses 20 ans dans les années 80, 90, qui avouerait, n’avoir pas eu à succomber aux charmes de ces compositions de Dina Bell, même par personne interposée… !?

L’artiste interprété par ses pairs

            Sans aucune surprise, les reprises sur support et les interprétations en cabaret des œuvres de Dina Bell, sont prioritairement pointées sur ses slows, dont le classicisme n’est plus à établir.  Sophie vient en tête des œuvres les plus visitées, autant par Dina Bell lui-même, qui en a commis déjà quelques reprises, que par un interprète aussi doué que Tom Yom’s. Sa version de Sophie, est tout simplement décoiffante. Plus près de nous, la version jazzy de Germaine Ebelle, dont nul mélomane averti du milieu de la musique camerounaise n’ignore l’immensité du talent, est tout simplement surprenante !

Dina Bell : un immortel du makossa

Le compositeur de Mbemba Iyo et de Sophie, par son implication et sa réussite à l’histoire du makossa, s’est déjà donné une stature d’immortel du genre. Tout comme les autres ténors de cette mouvance musicale, il tient, plutôt bien que mal, son rôle au sein de l’édifice voulu et vivifier par tous. Cependant, en tant que l’un des gardiens de l’orthodoxie de ce rythme musical, du chemin reste encore à parcourir. Et, il leur restera toujours de la route à arpenter pour maintenir vivace la flamme levée,  tant pour leur propre compte que pour celui des générations futures. Et notre homme a assez de talent et de vista pour s’y maintenir sans trop d’anicroche. 


©Essombe Mouangue 2010
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-          Essombemouangue.blogspot.com


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