mardi 13 mars 2012

JC Mbimbé (suite) Les morceaux de choix du makossa de Jean Claude Mbimbé



Faisant suite à Etonda ndolo, Oa na oa, Mambo ma longue et Muto permettent à JC Mbimbé d’atteindre un summum d’expressivité quant à l’épanchement  de son écriture  « romantique »

Il est difficile en écoutant Jean Claude Mbimbé de déclasser l’une ou l’autre de ces plages musicales,  tellement la qualité musicale et d’expression en est tout le temps au rendez-vous. Certaines de ces pièces d’ailleurs, de prime abord peuvent paraître inintéressantes ou difficiles à l’écoute. Mais elles se révèlent toutes au final, contenir un fond qui assoie leur beauté aux yeux du public. Résultat, qu’il soit en train de nous proposer des  slows ou du makossa pur et dur, JC Mbimbé parvient toujours à enlever la mise. Il réussit le tour de force de faire de son makossa, un makossa dansant, mais aussi, des créations que l’on se plaît aussi à écouter, à accrocher aux mots.
Une ambivalence qui est la marque des grands dont nous ne rappellerons pas les noms ici. Une ambivalence qui nous amène finalement à constater la prédominance de la thématique quelle qu’elle soit, sur le makossa de JC Mbimbè. Car si de prime abord en écoutant l’un de ces morceaux, il nous prenait l’envie de danser comme naturellement devant toute variété musicale du terroir, cet assouvissement passé, on est obligé de s’asseoir pour écouter le message, pour écouter les mots distillés par ce magicien de la problématique amoureuse.
Certes, on peut dire, que sa thématique ne se résume pas à l’évocation des tourments amoureux. Il lui est même arrivé d’explorer des thèmes qui en appellent à un examen de conscience de tout un chacun. Pour exemple, la misère éthiopienne, des années 80-90 dans le titre Ethiopia, qui a bouleversé plus d’entre nous. Mais, reconnaissons-le, ces années-là, son terrain de prédilection restait la dissertation amoureuse, si je peux  ainsi présenter la chose.
Ethiopia : Ce pays, les époques antérieures, que de joie / Au sein de ce pays, les époques antérieures que d’amour/il est vrai qu’actuellement ton sol est brûlant/ Quelque part tu es aussi responsable de ce qui t’arrive/ Éthiopie, j’ai eu vent de ta disgrâce/ Que te reste-il ?! De la souffrance, de la famine, de la douleur, des guerres / Il faut les aider/ Aidons-les pour la vie : les enfants d’Ethiopie ont besoin de boire/ Aidons-les tous/ Les enfants d’Éthiopie ont  besoin d’aide/

Jean Claude Mbimbé et la problématique de la relation amoureuse toujours en instance de construction

Nous l’avons dit, s’il y a un sujet sur lequel s’appesantît Mbimbé, c’est bien celui de la relation amoureuse. Les artistes makossa qui se sont attaqués à ce sujet sont nombreux. Le makossa dont la thématique tourne généralement autour du vécu du quotidien de l’artiste et de ses concitoyens, fait de ce thème un tourillon central. Ce qui différencie les principaux utilisateurs de cette thématique, c’est l’angle d’attaque choisie par les uns et les autres pour traiter de la chose.

JC Mbimbé plus vrai que nature dans sa narration sentimentale

Concernant particulièrement JC Mbimbé, il privilégie pratiquement et toujours, la posture de l’amoureux transi, celle de l’amoureux en quête d’un amour impossible, douloureux, meurtri et martyrisé par son entourage. Mais aussi une idylle amoureuse lorsqu’elle est au plus beau fixe, qu’il place au dessus de l’influence souvent contradictoire de la famille et des amis. C’est un être qui doit, pour maintenir ses acquis amoureux, se faire violence constamment !
Une posture amoureuse qui crée une forte tension, née de l’irrésolution, de l’incertitude à attacher à ces relations si belles, mais si angoissantes aussi, tellement l’engagement de l’aimant reste hypothétique et entouré d’écueils ; des écueils qui du jour au lendemain, peuvent remettre en cause les vœux des aimants. C’est ce qui fait de JC  Mbimbé, ce crooner ténébreux, narrant plus des amours en perpétuels dangers, que des amours sans écueils. Là où par exemple Douleur, choisit d’investir l’humour, dans sa narration des relations amoureuses, où Ben Decca, plutôt que de se mettre au premier plan, en traite par personne interposée en se servant toujours de la femme, où Petit-Pays, encore plus stressé et plus faux que lui-même, fomente (par souci de dissimulation certainement)  des histoires invraisemblables ou légères, Mbimbé lui, se met apparemment, le plus sérieusement possible, au centre de sa création. Et ceci, en tissant  patiemment des mailles solides qui laissent toujours supposer que ce qu’il dit et raconte quant au sujet qui nous occupe, lui est intimement lié. Lui, ce jeune homme qui a une place à prendre dans la société. Lui ce jeune homme qui entretient sans aucun doute des relations avec la gente féminine. Lui ce jeune Deido-boy qui a développé une expérience particulière par rapport à cette gente féminine. Lui ce jeune séducteur qui n’en a pas fini d’en découdre avec elles !

Oa na oa, Mambo ma longue, A muto, le pur opium des dissertations amoureuses de JC Mbimbé

Si JC  Mbimbé ne parle pas de lui-même dans ces titres traitant de la relation amoureuse, alors, on peut au moins dire qu’il prend énormément de temps pour asseoir la cohérence et l’unité de son message. Il est si poignant dans ses textes qu’on a presque envie de le passer au premier plan de ceux-ci et d’ainsi oublier, le rôle de l’artiste, qui n’est pas seulement de développer une attitude nombriliste, mais d’être aussi une sorte de miroir reflétant les éléments les plus contondants de sa société. Et contrairement au succès rencontré par son premier album auprès du public, les pièces où éclatent véritablement, selon moi bien entendue, le génie « romantique » de Mbimbé sont issues de son deuxième album. Venant en appui du titre Etond’a ndolo, les titres Oa na oa, Mambo ma longue, et à Muto, profitent énormément dans ce domaine du murissement de l’artiste. Elles restent ces créations les plus fortes en termes de dissertation amoureuse. Dans ce chassé-croisé de tête, le titre Oa na oa tient largement la vedette ; il y déploie une énergie incroyable, un pep qu’il met au service de la trame qu’il bâtit. Assez théâtral dans son écriture, il nous entraîne corps et âme dans cet engagement si capital : celui des relations amoureuses qui se doivent de rester, de s’inscrire éternellement dans le temps. Ici aussi, on est aussi pratiquement dans l’ordre de l’incantation, tellement JC Mbimbé nous assène d’arguments définitifs, qui ne devraient souffrir d’aucune discussion ni recours !
Oa na oa : Vous n’avez même pas essayé de savoir quelle bonheur je tire de cette relation avant d’en médire/ Vous n’avez même pas essayé de savoir si cet amour me conforte avant d’en médire/ Je n’ai rien fait pour qu’il vous vienne à vouloir sa mort/ Mon amour, avec toute la souffrance possible, je porte à bras-le-corps notre amour, même si tout Paris nous jette la pierre/ Mais je te suis attaché par ce que tu es mon amour, parce que tu es la femme que j’aime/ Ce n’est qu’à toi que je pense/ Ce n’est que toi que j’aime/ Je ne veux que cet amour/et s’il perd de sa flamme je m’attèlerai à la rendre toujours plus vivace/ Mais mon amour, laisse-les médire de nous/ Ils en seront fatigués un jour et laisseront tomber/ Lorsque je dors, je ne rêve que de toi et lorsque je me réveille, ton seul nom s’impose sur mes lèvres/

Les avatars musicaux de JC Mbimbé

La technique de chant (je préférerais même parler de feeling musical) de  JC Mbimbé étant assez exigeante comme pour tous les ténors de la maison makossa, il aurait été étonnant qu’avec la bouillabaisse qui nous est servie ces derniers jours, qu’il y ait beaucoup d’interprètes qui s’en rapproche. Néanmoins, de ce fumier pas du tout reluisant, j’en tire quand même un qui mérite qu’on s’attarde sur le travail qu’il est en train de réaliser dans ce sens : Joly Priso ! Oui ! Joly Priso au sein duquel personnellement, je retrouve les traces du maître, par la production de ce makossa à rallonges qui a fait le succès de plus d’un grand interprète de ce genre. Joly Priso qui dans Tete yungu et autre titre du même album, retrouve la verve de l’un des maîtres incontesté de ce genre qu’est JC Mbimbé ! Joly Priso dont on connaît l’énorme et heureuse implication auprès des interprètes du makossa actuel.

JC Mbimbé devant le tribunal de l’histoire

Pouvons-nous toujours dire que Jean Claude Mbimbé est passé à coté d’une grande carrière ou, l’a-t-il réussi finalement ? Quand on voit les œuvres produites, il est difficile de conclure à l’échec. On est même plutôt tenté d’applaudir au génie de cette artiste, qui n’a pas eu finalement besoin de beaucoup de temps, ni de moult albums pour graver son nom au panthéon de la musique camerounaise.  
Ce qu’on peut par contre craindre, c’est que cet immense talent du makossa, n’ait pas eu le temps de donner tout ce qu’il avait dans le ventre ! Pour cause de départ prématuré ! C’est cela qui peut aussi légitimer son retour sur la scène, tout en sachant, qu’il faudra peut-être repartir de zéro, renouer avec les fondamentaux, ré-convoquer le talent des uns et des autres, pour retrouver la voie royale, celle du makossa qui chevauche gaillardement les espaces et les époques.   

©Essombe Mouangue 2012
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